Libertés pour les expressions ?

Ce blog est consacré à la critique des actualités et des productions culturelles qui questionnent la liberté d’expression.

Les deux fils rouges de La Ligne jaune sont d’interroger les fameuses « limites » de cette liberté, et de servir la cause de la « critique ».

La liberté d’expression est une « liberté suspecte », comme le dit Denis Ramond [1]. Les démocraties se définissent par le droit de propager et défendre ses opinions, mais elles sont pour le moins attentives aux discours considérés comme nocifs.

En France, cette liberté est loin d’être sans limite. On est condamné pour l’apologie ou la provocation à commettre des crimes, le négationnisme, la diffamation, l’injure. Tant mieux, apparemment. Mais ça va se compliquer quand on va parler d’art ou d’humour.

Dieudonné est souvent concerné, les pamphlets de Céline ne sont pas réédités, Thuram est sommé de nuancer ses propos sur les Blancs qui se sentent supérieurs, on cherche à s’attaquer aux fake news, « l’humoriste » Tex perd son travail à cause d’une blague misogyne. On n’a pas le droit, à moins de 18 ans, de regarder des films pornographiques montrant les choses qu’on a pourtant de droit de faire depuis quelques années (combien d’années ? On ne sait pas trop dire quand est-ce que chacun peut laisser son corps se chercher librement). La manif pour tous (#LMPT) peut prétendre que l’avortement est un crime, et considérer que l’homosexualité est contre-nature, mais les supporters de foot – quand on les laisse se déplacer – ne peuvent plus chanter que les adversaires sont des pédés.

Quand est-ce que c’est heureux, quand est-ce que c’est regrettable ? Les cas ne se ressemblent pas mais s’accumulent et participent finalement à un même débat permanent, un bruit de fond désagréable, toujours en sourdine. Les procès médiatiques se mélangent mais comme les décisions de justice arrivent bien après que les affaires sont sorties de l’actualité, les jugements sont peu connus du public. La une a évidemment choqué, mais le lecteur sait-il, par exemple, si le journal Minute a finalement été condamné pour sa caricature de Taubira en singe qui retrouve la banane ? [2]

« Ce beau pays de France, où les Juifs courent toujours » ne rit pas de tout, ou pas avec tout le monde. Ça devient tellement n’importe quoi que des auteurs pourtant publiés et qui vendent beaucoup de livres proclament partout qu’on « ne peut plus rien dire ». La « libération de la parole » s’est inventé un vague ennemi: la « pensée unique ». Et les indignations donnent l’impression d’être en compétition.

Le projet de ce blog est d’essayer de revenir au cas par cas pour tracer petit à petit les contours de l’interdit ou de l’autorisé. Parce que je ne les connais pas et que ça m’intéresse de les chercher. Et pour les tracer, la critique est préférable la censure, à la com’, à la polémique, à la morale.

[1] Denis Ramond, La bave du crapaud, Petit traité de liberté d’expression, Editions de l’Observatoire.

[2] Oui, et encore en appel.